vendredi 8 août 2008

Benoît Duteurtre, Service après vente


Benoît Duteurtre nous invite ici à voir l’homme sous l’angle de l'allégorie de la caverne revue et corrigée par la modernité. L’homme est (s’est ?) perdu au fond de l’antre numérique. Le nouveau feu ? La technologie venue « changer notre vie ». Les ombres sur les parois ? Nos nouvelles illusions : se croire libre de toute décision dans l’univers électronique qu’on dominerait et qui serait au service des hommes ; se penser relié à tout, en tout temps et en tout lieu au cœur d’une sorte de réseau fraternel et universel.

Les mécanismes sont bien dénoncés, dans ce texte où l’on flirte avec les théories de l’absurde d’un Camus ou d’un Ionesco : l’industrie numérique berce les consommateurs en leur faisant croire qu’ils sont des « clients privilégiés », elle les endort en leur offrant des cartes, des points fidélité, des cadeaux, des promotions, des voyages.

Au bout, il n’y a qu’une nouvelle forme de dictature, où les individus sont universellement uniformisés : du chef d’entreprise au pseudo adolescent rebelle, en passant par la « racaille » des banlieues et le curé en soutane. Quels que soient leur look, leur discours, tous, au-delà des signes tribaux qu’ils affichent portent les mêmes fers d’un esclavage bien réel, dont le maître absolu est l’industrie numérique, dont le fouet est la consommation dératée vers le toujours plus, le toujours mieux.

Disons-le, les victimes sont plutôt consentantes. Si on saisit bien leur ridicule, on ne peut guère les plaindre de leur aliénation progressive mais totale. Il aurait fallu ne pas abandonner l’esprit critique, mais ç’aurait été rechercher l’effort dans un monde où l’on veut nous faire croire que tout doit être toujours plus léger, plus rapide, plus insouciant.

La machine s’enraye-t-elle ? Commenceriez-vous à douter d’elle ? A refuser de payer ce qu’on vous impose sans que vous l’ayez demandé ? Vous voilà coupable d’hérésie ! Pour le moins, vous êtes prié de culpabiliser ─car la culpabilisation restera toujours le grand ressort de la manipulation des masses. Comment ? Seriez-vous de ces fous hagards et sans ambition, destinés à flotter sur une barque velléitaire au gré des flots fétides du doute ? Vous avez le choix : la rive du passéisme (mais vous êtes ringard, crucifié, mort, fini) ou celle du futurisme (et vous êtes un mec bien, dynamique, vivant, ambitieux, qui a encore un avenir).

Alors, dans un monde devenu un entonnoir, il faut choisir son camp. Résistez-vous, que vous voilà étiqueté paumé, « déclassé, rebut d’humanité », raillé par « un monde absolument moderne ». Résister, ça a un prix. Regagner le rang, c’est le confort assuré de l’uniformité.

Pour ce qui est du style, on retrouve le Duteurtre de Drôle de temps, mais avec une écriture peut-être plus rapide, un peu moins travaillée. Le dernier chapitre est faible et mériterait d’être refait. Si les idées qu’il amène sont utiles pour finir le roman (le point de vue contradictoire de l’industrie est donné, style « droit de réponse »), elles sont très vite et trop brutalement posées. On pourrait croire qu’il fallait très vite finir avant l’impression, quitte à bâcler un peu.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

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